Après La Loi du marché, qui montrait de manière cinglante comment la tyrannie économique contemporaine pouvait faire de nous des salauds en puissance, on comprend aisément que Stéphane Brizé ait voulu se ressourcer ailleurs, dans une autre époque, la Normandie du XIXe. Sans manquer pour autant de bravoure, puisqu’Une Vie s’attaque à un classique de la littéra- ture française signé Guy de Maupassant. Non loin du monument de Flaubert qu’est Madame Bovary.
Dans son audace, Brizé reste humble. Ici, pas de fresque rutilante, de costumes chatoyants, mais la campagne humide, et le regard resserré sur une femme, Jeanne Le Perthuis des Vauds, fille aimée et aimante d’aristocrates. On la voit enfant, partir au couvent pour ses études, se marier. Elle est d’une nature confiante, faite pour le bonheur. Sa vie ne sera pourtant qu’épreu- ves, chagrin, désillusion terrible.
La qualité du film est de freiner curieusement sa part mélodramatique et romanesque. En jouant souvent sur le décalage entre la voix off (plutôt littéraire, dynamique) et l’image, simple, presque plate, montrant souvent l’héroïne dans des tâches du quotidien, en train de jardiner, ou seule, à la fenêtre, perdue dans ses pensées. On la voit dépérir à vue d’œil, mais Judith Chemla lui donne une forme d’innocence rageuse, de foi gracieuse. TÉLÉRAMA
UNE VIE
Réalisateur(s) : Stéphane Brizé
Acteur(s) : Judith Chemla, Jean-Pierre Darroussin, Yolande Moreau
Genre(s) : Drame
Origine : France
Durée : 1h59
Synopsis : Normandie, 1819. A peine sortie du couvent où elle a fait ses études, Jeanne Le Perthuis des Vauds, jeune femme trop protégée et encore pleine des rêves de l’enfance, se marie avec Julien de Lamare. Très vite, il se révèle pingre, brutal et volage. Les illusions de Jeanne commencent alors peu à peu à s’envoler.