SLALOM

Œuvre au sujet épineux, Slalom arrive sur nos écrans en droite ligne avec la cascade de révélations actuelles sur les abus sexuels dans le milieu du sport professionnel. Derrière la photographie magnifique et les paysages de montagne en contrepoints fort impressionnistes, le film de Charlène Favier glace le sang dans la peinture qu’il livre de ce milieu du sport de haut niveau bien connu de la réalisatrice. Le corps de l’athlète y est non seulement entraîné mais aussi complètement asservi au culte de la performance jusque dans ses plus intimes mouvements. Déjà présente dans Odol Gorri, film court de la cinéaste éligible aux derniers César, la magnétique Noée Abita prête son corps à la lente entreprise de réification orchestrée sous nos yeux, avec la connivence quasi générale des protagonistes du film. Jusqu’à être un petit chaperon rouge amené à regarder le loup dans les yeux. À la fois témoignage d’un aveuglement ambitieux et mise en scène crue d’une agression lourde de non-dits, Slalom montre surtout la solitude immense de Lyz, dans une station alpine filmée sans ses touristes, avec une étrangeté digne du Snow Therapy de Ruben Östlund. Le mot final, asséné par la jeune héroïne à son entraîneur pathétique, tombe comme un couperet qui soulage. Comme la victoire véritable d’une prise de conscience irrévocable. ⎥ Nicolas Milesi