Épousant à la perfection les mises en forme et les codes du cinéma et des séries des années 70, Rojo aurait pu être un bel objet formellement ciselé, « à la mode » et vide de sens. Il n’en est rien. À l’image de la séquence inaugurale qui installe le personnage principal Claudio – à la morale si discutable – (Dario Grandinetti, magistral) et l’ambiance poisseuse du film, le récit ose prendre son temps et suinte du climat propice au coup d’état militaire qui plongera l’Argentine dans la dictature. Film à l’ambiance cynique et cruelle, mais aussi film d’Histoire, Rojo ménage des séquences intrigantes portées par des personnages louches. Comme l’illustration de l’état d’esprit d’une période sombre, une période dans laquelle bien des nantis ont détourné le regard devant l’histoire en train de basculer subrepticement. Si Rojo prend le parti d’être parfois drôle et décalé, c’est aussi un film réellement angoissant. Et qui vaut le détour ! ⎥ Nicolas Milesi
ROJO
Réalisateur(s) : Benjamín Naishtat
Acteur(s) : Dario Grandinetti, Andrea Frigerio, Alfredo Castro
Genre(s) : Drame
Origine : Argentine
Durée : 1h50
Synopsis : Argentine, 1975. Claudio, avocat réputé et notable local, mène une existence confortable, acceptant de fermer les yeux sur les pratiques du régime en place. Lors d’un dîner, il est violemment pris à parti par un inconnu et l’altercation vire au drame. Claudio fait en sorte d’étouffer l’affaire, sans se douter que cette décision va l’entraîner dans une spirale sans fin.