Red Rose

Red Rose

Red Rose

Réalisateur(s) : Sepideh Farsi
Acteur(s) : Mina Kavani, Vassilis Koukalani, Shabnam Tolouei
Genre(s) : Drame
Origine : France, Grêce, Iran
Durée : 1h27
Synopsis : Téhéran, juin 2009, au lendemain de l’élection présidentielle usurpée. Le tumulte d’une ville qui tangue sous la « Vague verte » de contestation. Un appartement comme lieu de refuge. Un homme et une femme de deux générations différentes. Un téléphone portable et un ordinateur pour relayer les nouvelles de la révolte. Une histoire d’amour qui bouleversera le cours de deux existences.

L’histoire est simple : poursuivi par les bassidjis (les miliciens du régime), un groupe de jeunes manifestants trouve refuge chez Ali, un quinquagénaire triste et revenu de tout, qui a consenti à leur ouvrir la porte de son appartement. Tous repartent une fois le danger écarté, sauf Sara, qui s’incruste et deviendra la maîtresse de l’homme taciturne, qui vit reclus avec ses livres, dans l’attente d’une autorisation pour quitter l’Iran et rejoindre sa famille, émigrée au Canada. Commence un huis-clos fiévreux et érotique entre la jeune fille qui a mis toute sa fougue dans la «vague verte» et Ali qui, prisonnier de ses pesantes ténèbres intérieures, reste indifférent à la houle de l’insurrection qui bat jusqu’au pied de son immeuble. Elle lui apporte sa lumière, celle de son corps et de sa joie de vivre. Il lui répond par ses ombres, qu’il ne dévoile jamais. Ali a l’âge d’être son père. Il a donc connu la précédente révolution, celle qui mit fin à la tyrannie du Shah. Il en fut même un des acteurs, engagé dans un de ces nombreux groupuscules gauchistes qui fleurissaient alors sur le pavé de Téhéran, avant de faire partie des décombres. Lui faisait la révolution pour changer le monde. Pas Sara, qui n’est pas à proprement parler idéaliste. Elle cherche seulement à vivre sa vie. Elle n’en est pas moins une pasionaria, qui se fait belle non pour son amant mais pour aller manifester. «Si vous aviez réussi à l’époque, on ne serait pas à présent dans la merde», lui reproche-t-elle.

Dès lors, Red Rose est d’abord l’exploration du fossé séparant deux générations, deux contestations, deux façons radicales d’envisager le monde. Celle d’hier croyait à la force des livres et des idéologies, celle d’aujourd’hui ne lit pas et ne jure que par Twitter. Elles ne font donc pas la révolution de la même manière. Reste le recours aux passades charnelles. Mais là encore, des malentendus. Sara avoue venir d’abord chercher «un homme et un lit» et, en faisant l’amour, espère se laver des obscénités et menaces de viol que lui lancent les miliciens. Ali, lui, est plus ambigu. En revanche, leurs adversaires n’ont pas changé. Ils communient toujours dans les mêmes valeurs. Ce sont donc eux qui gagneront. La cinéaste, pour engagée qu’elle soit, a l’honnêteté de souligner que la révolte de 2009 fut surtout celle des beaux quartiers, et que «l’Iran d’en bas» (à Téhéran, les classes aisées vivent sur les hauteurs), celui des femmes qui viennent en tchador noir, sans la moindre mèche qui dépasse, faire le ménage chez les riches, n’ont pas bougé, contrairement à la révolution précédente. Film politique porté jusqu’à l’incandescence en dépit d’une fin assez maladroite, Red Rose, avec sa charge violente contre les religieux, n’hésite devant aucun risque. Et fait paraître bien mièvre une bonne partie de la production cinématographique iranienne actuelle. Il a été tourné en Grèce, mais les acteurs sont iraniens. La prise de risque est aussi qu’ils ne puissent jamais revenir dans leur pays.⎥Libération

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