LES NUITS DE MASHAD

LES NUITS DE MASHAD

LES NUITS DE MASHAD

Réalisateur(s) : Ali Abbasi
Acteur(s) : Mehdi Bajestani, Zar Amir Ebrahimi, Arash Ashtiani
Genre(s) : Thriller, Policier, Drame
Origine : Iran
Durée : 1h56
Synopsis : Iran 2001, une journaliste de Téhéran plonge dans les faubourgs les plus mal famés de la ville sainte de Mashhad pour enquêter sur une série de féminicides. Elle va s’apercevoir rapidement que les autorités locales ne sont pas pressées de voir l’affaire résolue. Ces crimes seraient l’œuvre d’un seul homme, qui prétend purifier la ville de ses péchés, en s’attaquant la nuit aux prostituées.

Les Nuits de Mashhad apporte la confirmation du talent du cinéaste irano-danois Ali Abbasi, et démontre son aisance sur des terrains variés. Après la révélation Border, conte fantastique inouï empruntant à la mythologie nordique, Abbasi change de registre pour proposer un portrait âpre et brutal de son pays d’origine. Border fascinait et dérangeait en repoussant les limites de l’étrange ; Les Nuits de Mashhad précipite le spectateur dans le réalisme de l’atmosphère suintante et glauque des bas-fonds iraniens, où il restera immergé tout au long d’un récit qui dévoile peu à peu des couches insoupçonnées. La première partie investit le climat et les tonalités du thriller pur, combinant le suspense rythmé d’une énigme policière à la noirceur glaçante de la description des actes d’un tueur en série. Un criminel dont le film donne rapidement à comprendre qu’il est en fait le produit de son environnement, sclérosé par un fondamentalisme religieux dangereux et absurde qui pollue toutes les strates de la vie iranienne. Après Border et son étude de la monstruosité, Les Nuits de Mashhad montre qu’une société peut fabriquer ses propres monstres. L’intrigue s’inspire d’un épisode réel et prend pour cadre un lieu saint qui entretient l’endoctrinement d’une population aveuglée. La puissance des faits et du récit et celle de la mise en scène sont encore renforcées par la performance des acteurs : Mehdi Bajestani incarne avec une impénétrable ambivalence un homme ordinaire devenu assassin par la (dis)grâce d’un supposé mandat divin, et le rôle de la journaliste déterminée à le démasquer a valu le prix d’interprétation cannois à Zahra Amir Ebrahimi, réfugiée en France après des démêlés avec le régime iranien, qui s’est empressé de condamner le prix comme le film. Après le superbe et bouleversant Le Diable n’existe pas de Mohammad Rasoulof, Les Nuits de Mashhad poursuit l’œuvre de quelques cinéastes contemporains engagés dans une courageuse entreprise de dénonciation des dérives intégristes, espérant ouvrir les yeux des peuples du monde et les exhorter par le cinéma à défendre leurs libertés. ⎥ Audrey Pailhès

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