Ils reviennent et ne sont toujours pas contents. Qui ça ? Les morts vivants de George Romero. Une génération les sépare de la fournée précédente, celle de Day of the dead (Le Jour des morts vivants, 1985), pas le plus réussi de la série que débuta la désormais historique Nuit des morts vivants. On était alors en 1968 et, du côté de Pittsburgh, se jouait une sorte de révolution en noir et blanc granuleux : ces zombies qui « marchent parmi nous », selon l’expression consacrée, gagnaient une crédibilité nouvelle, tout en retrouvant un peu de la poésie des monstres expressionnistes du muet. Infraterrestres à la tête lourde, à la démarche gauche, à la dentition négligée, ils sortent encore une fois des tombes et envahissent le futur proche comme un vieux remords, un rebut mal digéré. Pires que les réprouvés zonant autour de la cité suave et hyperprotégée, une tour aux allures d’Empire State Building, ils sont la lie de l’humanité, sa pire menace et peut-être son seul salut. Le sentiment paradoxal qu’on éprouve à l’égard de ces horribles créatures est pour beaucoup dans la tension qui anime Land of the dead. Leur violence indistincte et vorace est logiquement passible de mitraillages en règle. En même temps, ils sont les seuls vrais rebelles à la société de consommation re- pliée sur soi qui tient désormais l’humain en laisse. Ils ont donc notre sympathie. La simplicité du scénario n’est qu’une façade. Un mercenaire, pour se venger de Kaufman, surpuissant patron de la cité, braque des missiles sur la tour d’argent qui domine un no man’s land apocalyptique. Une équipe de « justes » est chargée de l’annihiler, tandis que s’avance l’armée des zombies… Si Romero déroule cette mécanique avec une lenteur pouvant passer pour obsolète, c’est bien sûr en respect des canons de la série B. C’est aussi pour que puissent se lire, non à côté ni « sous » l’action mais dans l’action, les états de conscience de héros ordinaires. Riley, le chef des justes, adéquatement joué par un acteur sans relief (l’Australien Simon Baker), et sa clique bancale, où l’on se réjouit de retrouver Asia Argento en fille de choc, ne peuvent évidemment servir la cause de l’infâme Kaufman – Dennis Hopper fait ici culminer son habileté à jouer les superméchants, rodée dans mille nanars. A eux la mission (non commandée, celle-là) de discerner dans la déferlante des zombies, fabriqués après tout de chair humaine, ce qui pourrait ouvrir les yeux des mortels quant à leur propre monde. Pour les amateurs de pamphlet anti-Bush, il est cité ici verbatim : « On ne négocie pas avec les terroristes. » Mais Land of the dead s’inscrit, plus largement, dans la catégorie non officielle des films post-11 Septembre. A ce titre, il fait mieux que supporter la comparaison avec La Guerre des mondes, de Spielberg, autre apocalypse américaine. Romero use de moyens plus modestes, pour un résultat non moins effrayant. Produit artisanal recyclé et fin (?) de série, ce film redonne vie et force à un genre que son auteur a contribué à créer, mais qu’on pouvait croire six pieds sous terre. François Gorin (TÉLÉRAMA)
LE TERRITOIRE DES MORTS
Réalisateur(s) : George A. Romero
Acteur(s) : Devon Bostick, Simon Baker, Asia Argento
Genre(s) : HORREUR - ZOMBIES
Origine : USA
Durée : 0h1
Synopsis : Dans un avenir pas si lointain, une poignée de survivants barricadés dans une ville bunker vit encore dans le souvenir de l'ancien monde... Des zombies, qui désormais pensent et communiquent, s'organisent pour prendre d'assaut la ville bunker. Kaufman, autoproclamé chef des vivants, engage un commando de mercenaires pour contrer les attaques de ces morts-vivants d'un genre nouveau...